18 décembre 2017 : « Lève-toi et marche ».
Visionner « Lève-toi et marche » de Matthieu Firmin un jour de crise douloureuse, c’est un peu comme écouter Anthony and the Johnsons[1] après s’être fait plaquer. C’est enfoncer le couteau dans la plaie.
Pourtant lorsque je découvrais il y a quelques jours le super site de documentaires Spicee, je fus attirée, presque aimantée, par le titre de ce documentaire visionnable gratuitement.
Les 20 premières minutes ont suffi pour me faire rire et m’émouvoir. Et puis, j’ai entamé mon week-end tel que je l’envisageais, aussi reposant que gai et partagé.
Plus tard, j’ai commencé à ressentir une légère gêne dans mes pieds, mais rien d’alarmant, bien qu’étonnant. Le week-end s’est poursuivi jusqu’à hier soir. J’étais attendue à un anniversaire (décidemment, note à mes bons amis : ne plus jamais m’inviter à vos anniversaires !:) )[2], j’ai senti que quelque chose se tramait, j’ai préféré la jouer « safe », c’est-à-dire rester le dos bien coincé entre de nombreux coussins, un gros plaid, une tisane et un article à rédiger sur le cannabis.
Je n’ai pas eu le temps de relire les lignes que je venais d’écrire, quand, soudain, une douleur débutant dans ma nuque s’est diffusée dans ma mâchoire, puis a choisi de descendre jusque dans mes pieds. Une crise s’installait mais je ne présageais alors ni sa durée ni son intensité. Je terminais les genoux sur le carrelage de la salle de bain lorsque je tentais désespérément de me débarbouiller pour, au plus vite, aller me coucher.
Car quand la crise arrive, il faut anticiper, se dépêcher, car notre immobilité approche et que l’on ignore la durée de sa visite.
Entre l’instant des premières douleurs et celui où mes genoux ont heurté le sol, il me semble qu’à peine un quart d’heure s’est écoulé.
En un quart d’heure, je suis passée de raisonnable jeune fille rédigeant son coup de gueule sur l’achat de chanvre légal, à femme-légume ne pouvant plus ni me tenir debout, ni me tourner dans mon lit, ni me redresser pour boire, ni utiliser mes doigts pour pianoter sur le clavier de mon téléphone. Mon corps s’engourdit.
Je suis dévorée par la souffrance, si bien que je trouve difficilement la force de tirer sur ma cigarette électronique au cannabidiol pour tenter d’atténuer mes douleurs et mes spasmes musculaires, quand bien même mon amoureux me la coince entre les dents, tant mes mains sont fébriles.
Cette nuit, j’ai eu peur que mon petit cœur lâche, pour préserver mon petit corps soudain si faible, et si souffrant. Je me suis presque sentie partir. J’ai eu peur mais j’étais comme enveloppée dans un coton de sérénité. Je me souviens être parvenue, malgré mes douleurs dans la mâchoire et la faiblesse de ma bouche, à dire à mon amoureux, après lui avoir demandé de prendre soin de ma famille, « merci ».
Autrefois j’aurais plutôt tenté de dire « pardon » pour ce que je lui infligeais. Hier, je souhaitais qu’il ne retienne que ces cinq lettres. Cinq lettres, c’est peu pour lui exprimer toute ma reconnaissance. Car hier, en plus de m’avoir veillée toute la nuit, il m’a offert tant d’apaisement et d’amour, que si j’avais dû partir, je l’aurais fait avec sérénité. Presque une belle mort, en soi. Une mort qui ne laisse le temps qu’aux mots les plus précieux. Un passage doux, lovée dans les bras de ma moitié.
Ce matin, j’ai pu marcher, j’ai réussi à me tenir debout, même s’il m’a fallu me dépêcher de m’habiller, de cuisiner, et de vite me rallonger tant mes jambes manquent de force.
La crise est toujours là. Je ne sais pas si je me trouve au creux de la vague, si la crise est en train de partir ou de s’installer. Peut-être mon état délicat durera et s’installera, ou, chanceuse, je récupérerai en quelques heures. Je n’en ai pas la moindre idée, mais je peux affirmer que je n’ai aucun regret.
J’aurais fait tout ce qu’il fallait pour préserver mon corps, mon l’apprivoiser et pour profondément l’aimer. Alors, avec ou sans séquelle, avec espoir de marathon sportif ou marathon séries, avachie dans le canapé à grignoter des bâtonnets de crudités entourée de mes compères, je vivrai.
Et puisque vivre, c’est d’abord partager : voici le lien de ce documentaire, aussi doux qu’émouvant et dynamisant : https://www.spicee.com/fr/program/leve-toi-et-marche-884
[1] https://www.youtube.com/watch?v=Vgwp-iQenn4
[2] La crise la plus intense, en avril 2016, a eu lieu quelques heures avant un anniversaire que j’attendais avec impatience.