« On allaite ! Enfin… j’allaite mais tu sais on vit tellement tout à 3 que j’oublie que mes seins assument le truc tout seuls. »
Quand j’ai accouché il y aura bientôt 3 ans… Gosh ! Déjà ! je me suis surprise à dire « on a accouché », ou « notre accouchement s’est super bien passé ». Le petit être qui allait prendre sa première inspiration parisienne avait décidé de le faire ce 19 janvier, son Papa avait enfilé sa plus belle blouse de coach sportif, et j’étais concentrée sur la descente de mon mistigri, un peu comme si je devais l’aider à descendre la piste et que… J’étais la piste. C’était une affaire d’équipe. J’avais enfilé mon bandana de sportive, mon amoureux me pshitait de l’eau sur la frimousse et c’était parti pour cette belle descente en douceur.
Alors les jours et les semaines qui ont suivi j’ai instinctivement parlé de « notre accouchement ».
Et puis l’allaitement s’est installé un peu comme ça, sans crier gare, et ça a été « notre allaitement ».
On se demande souvent – et c’est tout à fait légitime ! Quelle place le Papa peut prendre les premiers mois si son amoureuse allaite leur nouveau-né ? Parce qu’on ne va pas se mentir : le nouvel arrivant sera greffé aux seins de sa mère la moitié de la journée… facile !
La peur de ce manque de place est d’ailleurs souvent mise sur le devant de la scène des freins à l’allaitement.
Pourtant, rassurons-nous, il n’y a pas un nombre de places prédéfini dans la vie du nouveau-né : une place pour l’alimentation, une place pour le sommeil, une éventuellement pour les doudous. Je crois que chaque place souhaitant être prise est… disponible !
Un Papa qui, d’emblée, se dit que si sa femme allaite il n’aura aucune place dans la vie de son nouveau-né (et que tant pis il jouera son rôle quand l’enfant apprendra à faire du vélo sans petites roulettes) ou… qu’il va lutter et faire peser une telle pression sur les épaules de son amoureuse qu’elle finira par :
-tirer son lait pour qu’il puisse le nourrir
-sevrer l’enfant pour le nourrir exclusivement au lait artificiel
Quel dommage !
Je crois qu’un Papa qui souhaite une place la trouve, que sa femme allaite, ou pas. Je crois qu’un Papa qui veut s’impliquer trouve sa place naturellement, sans avoir à attendre que l’enfant le supplie d’aller voir jouer le PSG ! Soit dès les premières heures, les premiers jours, les premiers mois.
On parle souvent de l’instinct maternel ! Il a bon dos l’instinct maternel ! Il ferait croire que seules les femmes entendent l’enfant pleurer la nuit, que seules les femmes savent quand l’enfant a faim ou froid. Et la volonté mâle dans tout ça ?
La volonté du papa allaitant peut pourtant permettre à la lactation de s’installer dans la douceur, elle peut permettre à la mère de se rendormir, au bébé d’être en sécurité : pour ce faire il est nécessaire de :
-se lever quand l’enfant réclame une petite tétée
-de le changer
-de l’amener à la bonne adresse « au sein de maman »
-de le recoucher
-de se recoucher
-de se féliciter d’être un super papa
-d’accepter que bébé se trompe parfois de « ney-ney » (oui, ça arrive que l’enfant plus grand se trompe de t-shirt à soulever quand le Papa a… l’instinct paternel ?)
Bref, mesdames, vos maris peuvent trouver leur place dans cette équipe allaitante ! Et ils trouveront forcément des modèles pas loin !
Lorsque j’ai eu la chance immense de rejoindre Carole Hervé pour mon stage final, il me semble que lors de la majorité des consultations de lactation que nous avons eues, les patients arrivaient en équipe ! Et les questions étaient principalement posées par : les Papas ! Quelle joie de voir ça ! Quelle joie d’être née dans les années 90 pour avoir le privilège de voir des Papas aussi impliqués que leurs amoureuses dans l’accompagnement, l’éducation des enfants et… la lactation de la prunelle de leurs yeux !
Lors de ces consultations, j’ai vu une maman souffrir d’une mastite (ça arrive, ça s’évite, et ça se soigne ! 🙂 Il était nécessaire de continuer à nourrir l’enfant le mieux possible. Cela s’est fait au DAL pendant une semaine :
-la maman tirait son lait
-le papa le donnait à l’enfant au DAL au doigt
Résultats : maman traitée et reposée, succion du bébé efficace, Papa fier et émerveillé, en quelques jours enfant de retour au sein avec un Papa tout près.
Messieurs au minimum soyez de bons coachs dès les premiers instants :
-de l’eau disséminée dans la maison : Maman est assoiffée!
-des bras, surtout si Maman a eu une césarienne, épisio etc. vous aurez la joie de porter l’enfant vers les bras tendus de sa Maman
-Rien ne vous empêche de susurrer des mots doux à vos deux amours pendant les tétées
-Et rien ne vous empêche de vous lever la nuit !
Donc, non, l’allaitement n’est pas qu’une histoire de mère ! D’ailleurs la marque Tajine Banane l’a clairement affiché par son slogan « TRIBU » sur certains de ses t-shirts d’allaitement, même s’il nous arrive parfois d’avoir envie de scander : « Milk ta mère ! » aux regards réprobateurs lorsqu’un bout de peau dépasse dans un square…