Cher Vanilla Milk,
Après avoir lu votre dernier post, comme nombreux d’entre nous qui vous suivons et admirons votre démarche, je n’ai pu me retenir de vous écrire.
Je comprends tout à fait le rôle de prévention qui peut en effet être le vôtre.
Cependant même s’il est vrai que l’alcool bu par la mère passe dans son lait, on parle là de doses minimes qui, prises à faible dose, ne sont pas risquées pour la santé de l’enfant allaité.
Le réflexe d’éjection qui suivra sera quelque peu amoindri de par la baisse de production d’ocytocine, c’est tout à fait vrai.
Il sera alors recommandé de : boire avec modération lorsque l’on allaite, au mieux d’espacer les tétées de 2h après le dernier verre pris voire de boire pendant la tétée.
Les médicaments aussi passent dans le lait, la nicotine, la caféine et donc il faut éviter d’en abuser, tout comme l’alcool donc.
Lorsqu’un bébé présente une allergie aux protéines de lait de vache la mère se verra fortement recommandé d’arrêter les produits laitiers mais aussi parfois la viande de bœuf, le soja. Bref, un véritable casse-tête pour continuer de s’alimenter lorsqu’il s’avère déjà compliqué de prendre une douche après l’arrivée de bébé.
Avant même de me reconvertir en diététicienne-nutritionniste spécialisée en post-partum, je savais que mon mémoire de fin d’études porterait sur l’hygiène de vie de la mère allaitante. Mon combat pour la flexibilité dans l’allaitement a commencé avant même que j’allaite moi-même, avant même que je le choisisse. Un été j’ai entendu une cousine, poussant la poussette de son bébé avec une cigarette dans une main, me dire tant elle était heureuse de ne pas allaiter pour pouvoir la savourer cette bouffée de nicotine.
Je comprenais tout à fait qu’elle prenne du plaisir à fumer, mais j’étais surprise qu’on ne puisse fumer en allaitant. Mes recherches ont alors débuté. Très vite j’ai découvert une littérature scientifique unanime sur le sujet : comme pour tout un chacun il est recommandé de se sevrer du tabac, mais il vaudra mieux qu’une mère allaite en fumant plutôt qu’elle n’allaite pas pour s’autoriser à fumer.
Peut-être que si cette cousine l’avait su avant, elle aurait adoré pouvoir allaiter tout en fumant, même quotidiennement.
Je crois sincèrement qu’il en est de même pour l’alcool. Alors j’encourage clairement et en conscience les mères à continuer d’allaiter même si elles boivent occasionnellement.
On leur conseillera d’espacer leur dernier verre de leur dernière tétée ou de boire littéralement en allaitant car l’alcool n’aura pas eu le temps de rejoindre leurs gouttes de lait.
Mais jamais je ne les alarmerai sur la nécessité d’une hygiène de vie irréprochable lorsqu’elles allaitent.
Au contraire je leur dirai combien elle importe si peu sur la composition de leur lait, je leur rappellerai que les interdits de la grossesse sont derrière elles, qu’elles peuvent penser à ce qui leur fait plaisir et si c’est un mojito dans une main et une cigarette dans l’autre, qu’elles le fassent et sans culpabilité.
À l’heure où la dépression post-partum est enfin sur le devant de la scène, comment un organisme comme le vôtre peut alarmer les femmes sur les méfaits d’un verre de Champagne pour Noël.
Les fêtes de fin d’années peuvent suffisamment être une source d’angoisse pour les femmes allaitantes. Elles auront déjà, peut-être, à faire face aux regards réprobateurs de la tante Micheline pour qui le biberon est la plus grande des libertés, à la tante Nicole qui pense que porter son enfant c’est en faire un enfant dépendant, à notre belle—mère qui ne supporte pas de voir un bout de sein dépasser.
Je crois que votre post, quand bien même il a vocation à informer les mères, risque d’encourager au sevrage de bon nombre de nourrissons tant vous êtes une référence en matière d’allaitement.
Je crois profondément que c’est par davantage de flexibilité et un accompagnement adapté que nous parviendrons à encourager les mères à allaiter.
C’est en levant ces freins-là que sont : le fait de pouvoir continuer à fumer, à boire occasionnellement, à manger peu varié, parfois peu équilibré, que nous accompagnerons vraiment les femmes vers cet allaitement serein pour lequel je ne cesserai de me battre au quotidien.
Je crois aussi que la frustration d’une mère se ressent clairement chez l’enfant.
Et à ce moment-là il nous reviendra le devoir de les accompagner vers un sevrage pour retrouver la liberté que nous leur volons en leur recommandant fortement de ne pas boire parce qu’elles allaitent.
L’allaitement n’est pas une grossesse. Il fait partie intégrante d’un quotidien qui se doit d’être le plus confortable possible pour la mère, compatible avec sa vie quotidienne qu’elle juge normale, habituelle.
Cela n’enlève en rien le fait qu’il est préférable pour tous d’éviter d’enchainer les shots de vodkas le samedi soir, de fumer 2 paquets de cigarettes au coin fumeur des boîtes de nuit, de se nourrir que de pain de mie à la confiture mais le faire de temps en temps fait partie de nos vies.
Et l’allaitement doit s’inscrire dans nos vies sans contrôle, sans culpabilité et avec flexibilité.
Chaque famille vit son histoire lactée comme elle l’entend, nous nous devons simplement de les accompagner si besoin est.
Même alcool info service se montre bien plus flexible que votre post.
J’ai la chance d’être référencée sur votre plateforme en tant que diététicienne-nutritionniste spécialisée en post-partum et j’en suis honorée, mais je ne suivrai pas, pour les raisons que je vous ai évoquées, les recommandations que vous avez données hier.
Je serai ravie d’en discuter avec vous et reste disponible pour le faire si vous le souhaitez.
Je vous souhaite une très belle semaine,
Pauline Sonnino-Laveix